LE DROIT AU MAINTIEN DANS LES LIEUX DANS LA LOI N° 48-1360 DU 1ER SEPTEMBRE 1948
Le maintien dans les lieux prévu par la loi du 1er septembre 1948 est mentionné aux articles 4 et suivants de la loi.
Le régime du droit au maintien dans les lieux
Le droit au maintien dans les lieux appartient au locataire, qui se voit notifier un congé de la part de son bailleur. Il lui permet de se maintenir dans les lieux à l'issue de son bail aux conditions fixées aux termes de celui-ci.
L'article 4 de la loi du 1er septembre 1948 dispose ainsi que
"les occupants de bonne foi bénéficient de plein droit et sans l'accomplissement d'aucune formalités du maintien dans les lieux."
Par cette formule, ce texte consacre, pour les baux soumis à la loi du 1er septembre 1948, qui sont en général à durée illimitée, la possibilité pour le locataire, se voyant notifier un congé, de se maintenir dans les lieux.
Ainsi que l'article 4 le prévoit, les occupants de bonne foi bénéficient de plein droit de ce droit dans les"conditions du contrat primitif non contraires aux dispositions de la présente loi, quelle que soit la date de leur entrée dans les lieux.
Le droit au maintien dans les lieux prend naissance à la date où le locataire reçoit le congé, lequel est strictement réglementé aux termes de l'article 4 alinéa 3 qui prévoit que :
"l'acte par lequel le bailleur notifie au locataire qu'il met fin au contrat de louage et qui entraîne l'application des dispositions précédentes doit, à peine de nullité, reproduire les dispositions des deux alinéas précédents et préciser qu'il ne comporte pas en lui-même obligation d'avoir à quitter effectivement les lieux."
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La loi de 1948 ne limite pas dans le temps la durée du droit au maintien dans les lieux.
Le droit au maintien dans les lieux : une prérogative qui appartient à l'occupant de bonne foi
Le droit au maintien dans les lieux n'est toutefois reconnu qu'à l'occupant de bonne foi, notion qui requiert que son titulaire justifie de l'existence d'un bail depuis son entrée dans les lieux.
L'article 4 de la loi de 1948 évoque un "bail écrit ou verbal".
Lorsque le bail est écrit, la preuve de son existence ne pose pas de difficultés.
En revanche, en présence d'un bail verbal, la charge de la preuve incombe à celui qui s'en prévaut. A cet égard, la jurisprudence admet, comme élément de preuve, des quittances de loyer à la condition toutefois que celles-ci mentionnent clairement que les sommes ont été payées et reçues à titre de loyer. Par ailleurs, dans un arrêt du 15 février 1968 (cassation civile 3ème 15 février 1968 : Bull civ III n° 58), la cour suprême a indiqué que le bail verbal pouvait être prouvé par tous moyens s'il existait un commencement d'exécution.
Il sera indiqué que le conjoint du preneur dispose, en vertu de l'article 1751 du Code Civil, du droit au maintien dans les lieux.
Le droit au maintien dans les lieux : une prérogative d'ordre public
Le droit au maintien dans les lieux constitue une prérogative d'ordre public de sorte qu'il n'est pas possible d'y déroger contractuellement. Une clause qui aurait pour objet d'y faire échec serait entachée de nullité absolue (Cassation civile 10 février 1956 : Bill Civ 1956.IV n° 144. Cassation soc. 22 janvier 1960 Revue Loyers 1961 page 88. Cassation soc. 14 mars 1962 Bull Civ IVn°274. Cassation civile 27 février 1969 : Bull Civ. 1969 III n° 175.)
En revanche, si le locataire donne congé, il sera considéré comme ayant renoncé à ce droit.
Le droit au maintien dans les lieux : un droit exclusivement attaché à la personne, non transmissible hormis les exceptions prévues à l'article 5
Le droit au maintien dans les lieux est, en vertu de l'article 17 de la loi du 1er septembre 1948, exclusivement attaché à la personne de son bénéficiaire. Il n'est pas non plus transmissible "sous réserve des dispositions de l'article 5".
La transmission du droit au maintien dans les lieux visée à l'article 5 de loi de 1948
L'article 5, dans sa rédaction résultant de la loi nouvelle n° 2014. 873 du 4 août 2014 dispose que
"Le bénéfice du maintien dans les lieux pour les locaux visés à l'article 1er appartient, en cas de d'abandon de domicile ou de décès de l'occupant de bonne foi, au conjoint ou au partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité, et lorsqu'ils étaient effectivement avec lui depuis plus d'un an, aux ascendants, aux personnes handicapées visées au 2° de l'article 27 ainsi que, jusqu'à leur majorité, aux enfants mineurs.
Le maintien reste acquis au conjoint, au partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou au concubin de l'occupant, lorsque cet occupant a fait l'objet d'une condamnation devenue définitive, assortie d'une obligation de résider hors du domicile ou de la résidence du couple, pour des faits de violences commis sur son conjoint, son concubin, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou sur leurs enfants. (...)".
Il ressort des termes de ce texte que le bénéfice du transfert du droit au maintien dans les lieux suppose que soient réunies les conditions suivantes :
- le décès de l'occupant de bonne foi
- L'abandon du domicile par ce dernier. La Cour de Cassation interprète restrictivement la notion d'abandon de domicile. Elle exige que soit établi le caractère brusque et non prévisible du départ de l'occupant de bonne foi. Elle précise qu'il n'est pas possible d'évoquer l'abandon de domicile en cas de départ organisé. (Cassation civile 25 mars 1987 : Revue loyers 1987, p. 271 ; Cassation Civile 18 octobre 1989 : Loyers et copropriété 1989 ; Cassation, civile 18 mai 1994 : Bull. civ 1994, III, n° 98)
- La personne revendiquant le droit au maintien dans les lieux doit, par ailleurs, faire partie de la liste des bénéficiaires visés à l'article 5. La liste est limitative. Elle concerne exclusivement le conjoint, le partenaire pacsé, les ascendants, les personnes handicapées visées au 2° de l'article 27 et les enfants mineurs.
Il convient de noter que les héritiers ne peuvent plus, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, évoquer un transfert du bail à leur profit. En effet, l'article 5 dans rédaction résultant de la loi de 1986 dispose que :
"Nonobstant les dispositions de l'article 1742 du Code civil, même en l'absence de délivrance d'un congé au locataire, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire."
Par ailleurs, les ascendants, les personnes handicapées et les enfants mineurs doivent impérativement justifier d'une cohabitation effective d'au moins un an avec le titulaire du droit au maintien dans les lieux. Dans un arrêt du 26 février 1970, la Cour de Cassation a refusé de valider le transfert au profit d'une personne qui n'avait résidé que de façon provisoire avec le titulaire du droit au maintien dans les lieux.
Enfin, l'article 5 de la loi dans sa nouvelle rédaction ressortant de la loi du 4 août 2014 prévoit un nouveau cas de transfert du droit au profit des victimes de violences conjugales. Cet article précise que le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l'occupant bénéficient d'un transfert du droit au maintien dans les lieux lorsque l'occupant a fait l'objet d'une condamnation définitive assortie d'une obligation de résider hors du domicile ou de la résidence du couple pour des faits de violence commis sur le conjoint, le concubin, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou sur les enfants.
Maître Dominique Ponté
Avocat Paris
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