LES TROUBLES ANORMAUX DE VOISINAGE : les responsabilités encourues
Vous êtes propriétaire ou locataire. Vous êtes victime de nuisances sonores en provenance d'un appartement voisin. Les nuisances que vous subissez consistent en des bruits de pas, de choc, de meubles déplacés, de vibrations .... Vous apprenez que votre voisin a changé les revêtements de sol dans son appartement (remplacement d'une moquette par du parquet ou du carrelage )
Vous avez effectué des démarches auprès de celui-ci pour que les nuisances cessent. Ces démarches n'ont rien donné.
Il faut constituer un dossier, qui vous permettra d'obtenir judiciairement la condamnation de votre voisin à rétablir l'isolation acoustique et, en cas de changement des revêtements de sol dans son logement, à remettre en place le revêtement d'origine ou un revêtement isolant.
La constitution de votre dossier est fondamentale. En règle générale, un dossier se compose d'attestations, de courriers recommandés adressés à la personne responsable des nuisances, de mains courantes déposées auprès des autorités de police.
Lorsque votre dossier est constitué, il vous faudra, le plus souvent, solliciter une expertise judiciaire acoustique. L'expert désigné interviendra contradictoirement après avoir convoqué les parties concernées. Il effectuera dans votre logement les mesures acoustiques appropriées. Il mentionnera, dans son rapport, les travaux qui s'imposent dans le logement posant problèmes afin que les nuisances cessent.
Une fois son rapport déposé, vous solliciterez devant le tribunal la condamnation de votre voisin, d'une part, à effectuer les travaux requis, visés dans le rapport d'expertise judiciaire, et, d'autre part, à vous indemniser du trouble de jouissance subi (atteinte à votre tranquillité). La Cour de Cassation considère que la privation de sommeil est une conséquence du trouble anormal de voisinage (Cassation Civile 30 mai 1966 : D. 66, 435).
La Cour européenne des droits de l’homme précise par ailleurs qu’un trouble anormal de voisinage porte atteinte au respect de la vie privée (CEDH 21 février 1990, Powell : RUDH 1990, 64 ; CEDH 9 décembre 1994, Lopez Destra : RT 96, 507).
Devant le Tribunal, le défendeur (copropriétaire en cause) peut évoquer le fait qu'il n'a commis aucune faute.
Sa responsabilité est encourue de plein droit sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage ainsi qu'en témoigne la jurisprudence de la Cour de Cassation.
Arrêt du 22 juin 2005 (Cassation Civile 3ème, 22 juin 2005 : Bull. civ. III, n°36) :
"Attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit que le propriétaire de l'immeuble, auteur des nuisances, et les constructeurs à l'origine de celles-ci sont responsables de plein droit vis-à-vis des voisins victimes, sur le fondement de la prohibition du trouble anormal de voisinage (...)."
Arrêt du 11 mai 2000 (Cassation Civile 3ème, 11 mai 2000 : Bull. civ. III, n°106)
"Qu'en statuant ainsi, alors que le ... propriétaire actuel des biens, auteur des travaux à l'origine des dommages étaient responsables de plein droit des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage constatés dans le fonds voisin, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;"
La responsabilité de votre voisin peut également être retenue sur le fondement de la responsabilité du fait des choses de l’article 1384 alinéa 1er du Code Civil, qui est une responsabilité sans faute (Civ. 2ème, 20 novembre 1968 : JCP 1970. II. 16567 ; Cassation Chambres Réunies, 13 février 1930 : GAJC, 11ème édition, n°193). Il s’agit d’une responsabilité présumée qui est encourue, en cas de changement de revêtements de sol dans le fonds voisin si ce changement est la cause des nuisances subies. Les revêtements de sol d'un appartement constituent des choses au sens de l’article 1384 alinéa 1er du Code Civil.
Maître Dominique Ponté
Avocat PARIS - les nuisances sonores (les troubles anormaux de voisinage)
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